vendredi 27 août 2010

SENEQUE ET LA VIE HEUREUSE


" Quoi donc ? la vertu suffirait à vivre heureux ?... " s'interroge Sénèque. Et s'adressant à ceux qui la laissent échapper : " Vous ne possédez pas le plaisir, c'est vous que le plaisir possède ".
Huit siècles d'Ecole stoïcienne - grecque puis romaine - ont forgé l'ascèse ( l'aïskesis grec ), cette idée d'exercice, d'entraînement quotidien à se modifier soi-même, à transformer son existence en vue de " calmer les tempêtes de l'âme ".

Les Stoïciens ( " gens du Portique " ) nous ouvrent la voie où nature et raison conjuguent leurs forces pour nous conduire au souverain bien. Pour Hegel, les Stoïciens sont le nom de la liberté de la conscience de soi quand elle prend conscience d'elle-même. Connaître et apprivoiser cet autre soi-même avec qui l'on vit pour nous rendre artisan de notre propre existence : n'est-ce pas l'objet de toute philosophie ?...

Et Sénèque de poursuivre son dialogue avec Lucilius : "Tu demandes quels progrès j'ai faits ?... J'ai commencé à être l'ami de moi-même." Encore faut-il " éviter ces bienfaits pleins de glu qui, pour notre plus grand malheur, nous trompent par ce leurre : nous croyons les posséder, nous y sommes collés ... " Un appel à résoudre enfin les vestiges toujours vivaces de nos désirs infantiles non résolus, sources d'obscénités sans nom, que nous ne voyons même plus. Appel à la médiation intérieure repris en écho près de vingt siècles plus tard par Bruno Bettelheim dans son " Coeur conscient " , et par toute la psychanalyse moderne à sa suite.

Rude thérapie quotidienne que nous proposent là les Stoïciens !... Mais grandir, n'est-ce pas continuer sans relâche à s'élever coûte que coûte au-dessus des petits arrangements comme des grandes infortunes qui font notre quotidien ?!...
Gens de bien, oui. Parce que nous le valons bien.

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