jeudi 29 juillet 2010

CONSCIENCE


Assis au bord du monde
l'homme y questionne son appartenance
ses désirs ses illusions
ses fantasmes comme ses possibles errances
Le reconnaît-il comme sien ce monde
quand son regard le croise ?...
Un regard qui crée les choses l'espace le temps
au coeur de ce lieu privilégié
où naît l'altérité
Dans ces égards partagés
ouvrant des voies à tous les vents
Souffle d'or ou souffle de mort
le piège s'ouvre des vertiges de l'avoir
au risque de la fraîcheur de l'être
En vain résonne l'appel clair de la tenue
de la retenue
Rien n'est écrit de ce qui dégénère
ou régénère
Tous les possibles sont en main
comme autant de cartes du destin
Seule compte la flamme frêle de la conscience
et le regard croisé dans ce miroir
où repose ce qui la reconnaît

lundi 19 juillet 2010

CONDAMNES A LA LIBERTE !...


" DESERT ", ultime texte de " NOCES " (1938) ... un écrivain de 26 ans pointe pour nous l'absurde qui n'est " que " l'expérience du silence où nous plonge notre liberté ". Nous sommes bien de ce monde " sans intention " , qui ne nous " regarde " pas, et qu'il nous faut dépouiller de ce que les hommes y déposent. Notre réconciliation avec lui repose sur le seul consentement.

Ainsi Albert CAMUS nous propose-t-il conjointement la joie et l'amertume. A notre image, l'écrivain redonne aux pierres sculptées par l'Homme antique leur existence de pierres sauvages rendues à la Nature. Théologie et Hédonisme sont renvoyés dos à dos : " Croire au Ciel " comme " Aller au septième ciel " reposent sur un même déni de la réalité. Décidément, il ne nous reste qu' à jouir de chaque instant comme si c'était ... le premier.

Etre " hors de soi ", faire la paix pour découvrir notre lien au monde : c'est sans doute cela "entreprendre la géographie d'un certain désert ". Quant à la philosophie, CAMUS nous la révèle utile ... " à rien du tout ", vu qu'elle nous enseigne à reconnaître avec bonheur ce qui n'a pas d'utilité.

L'univers de CAMUS nous laisse à notre liberté de devenir " qui nous sommes " : des hommes qui s'oublient dans le paysage et dont la vie est à elle-même son propre sens. Seule notre présence-absence à l'univers signe la découverte de notre plénitude. CAMUS célèbre "nos noces avec le monde "...

samedi 17 juillet 2010

MEMOIRE AU PRESENT


Un carillon tinte, lointain. Un pan de mur jaune s'expose, énigmatique, au regard. Une petite sonate ressuscite ses notes oubliées... L'écrivain suspend nos durées familières pour penser le temps et l'espace dans une bulle d'éternité.
En nous confiant sa vision des pavés de l'église de Combray qui se fondent en or blond et lumineux comme le miel, Marcel PROUST nous rend à la mémoire éternelle du présent. Le temps se dépouille là de son utilité immédiate et vient ajouter son épaisseur aux trois dimensions de l'espace connu.

La vérité du désir façonne l'espace malléable, redonne chair aux objets perdus, aux plus menus événements que l'on croyait oubliés. Le temps émerge par bouffées pour se faire oeuvre d'art. La distance s'abolit dans ce passage du moment retrouvé. L'éternité prend naissance au sein même de ce temps qui redevient nôtre.

Les vitraux de l'église de Combray se fluidifient sous une lumière mouvante : PROUST vit l'éternité en écrivant. Le rassemblement du temps dans l'unité du présent de l'oeuvre mène au bonheur d'une totalité retrouvée. Se profile alors, tel un Orient désormais accessible, le vaste labyrinthe immobile de l'intériorité.